Théâtre

Ça occupe l’âme est un huis clos à deux personnages.
Dans un espace vide, un couple est séquestré. Ils ne savent pas pourquoi ils sont enfermés.
L’homme et la femme racontent une série de souvenirs et de cauchemars. On comprend alors, qu’ils perdent la mémoire.
Deux personnages se racontent. Deux êtres, terrifiés de perdre la mémoire, parcourent leurs souvenirs à voix haute comme autant d’histoires qu’on raconte, pour ne pas les oublier. Pour qu’elles existent encore.
Nos vérités sont multiples et infidèles. Nous avons tant besoin d’une histoire que, parfois, nous parvenons à l’inventer. Créer de nouveaux souvenirs, de très anciens même, enfouis, pour combler des fosses d’absence, ne serait-ce que pour pouvoir avancer. Retrouver cent mille légendes qui constituent les souvenirs de notre vie passée. Notre présent déjà transformé. Avoir une représentation de ce ‘nous’ passé, pour que le présent soit vivant, quitte à remplir l’absence de chimères. L’essentiel est d’y croire.

Marion Pellissier

La question de la mémoire inerve aussi le dispositif scénique : un cube, dans lequel sont enfermés les personnages, et dont les murs sont transparents pour nos yeux de spectateurs, à l'exception de la paroi arrière, dans laquelle nous voyons les images que des caméras captent des deux séquestrés.
Les images que nous voyons nous donnent un autre point de vue, font le point - à la manière de caméras de surveillance - sur des détails que nous ne voyons pas depuis notre siège, et parfois nous sommes troublés car un détail semble diverger d'avec le réel : un geste légèrement décalé, une rythmique dissonante dans les corps... Voyons-nous à l'image l'exacte réplique du plateau ? Ou bien le présent s'est-il diffracté, ajoutant à la difficulté des personnages de se souvenir l'inquiétante impression pour nous que ce que nous voyons se dérouler sous nos yeux a déjà eu lieu ?
Depuis quand sont-ils dans cet espace, à réécrire un passé dont l'origine a déserté, laissant les personnages seuls au bord du gouffre du présent ? Combien de fois ont-ils réécrit leur histoire ?
La fiction aide à supporter une réalité trouée, dont il faut combler les trous pour continuer à vivre.

N. C.

* Assistanat à la mise en scène : Sylvère Santin
* Interprétation : Julie Mejean & Florian Bardet
* Construction : Emmanuelle Debeusscher
* Création Lumière : Jason Razoux
* Création Son : Thibault Lamy
* Composition musicale : Jean-Baptiste Cognet
* Création Vidéo : Nicolas Doremus & Nicolas Comte

© crédits photographiques : Nicolas Doremus & Tiodhilde Fernagu